Une pièce percutante d’actualité est à la Bordée présentement. Le thème principal aborde la délicate et complexe question du consentement sexuel. Dès le départ, un simple texto vient chambouler la vie d’une jeune famille, notamment celle du père, et par ricochet celle de sa conjointe et leur poupon.
Vingt-cinq ans se sont déroulés depuis un évènement en apparence banal, du moins pour deux jeunes garçons qui à l’époque portaient leur seize ans. L’histoire diffère toutefois pour l’adolescente qui a « sur-vécu » à cet énigmatique trio amoureux improvisé sur une plage de Rivière-du-Loup. Suite à cet évènement, plusieurs tableaux se dessinent et les malaises des uns rencontrent les non-dits des autres. Un père aimant, veuf depuis peu, combien maladroit, cherche tant bien que mal à accueillir son fils déchiré par la douleur et la culpabilité. Une sœur explosive, qui malgré son apparent manque de tact, réussi à faire cheminer son frère et plus difficilement le complice de ce dernier. Justement, celui-ci psychologue de formation, se cache derrière sa rhétorique pour échapper à son passé et préserver son futur. Dans cette pièce, un épisode dramatique en cache un autre.
Par-delà une génération, deux drames de même nature se juxtaposent. Ainsi, les glaces recouvrent également le corps abimé d’une autre victime, elle aussi spoliée non seulement dans son corps mais aussi dans sa dignité et son identité de femme. L’ultime rencontre entre les deux va mettre au grand jour le passé de l’une, qui faute de pardon ne réussi pas à guérir, et le présent de l’autre qui voit son rapport avec son propre corps stigmatisé, probablement à jamais. Ici, l’identité de son agresseur a de quoi surprendre, croyez-moi. Le moins que l’on puisse dire c’est que la pièce Les glaces s’oppose radicalement à l’expression « rester de glace ». Tout est nickel. Un décor épuré qui donne sur l’essentiel, des trames sonores aux accents graves, une écriture puissante qui sait allier philosophie et humour, un scénario brillant qui ne tombe pas dans les clichés, le jeu des acteurs, actrices qui mobilise nos émotions et nous tient captif du début à la fin. Les glaces, c’est une remarquable production théâtrale qui s’attaque aux rapports amoureux homme-femme avec toutes les subtilités que cela comporte, y compris bien sûr la notion du consentement sexuel. Cette épineuse question fut trop longtemps occultée et maintenant elle loge non seulement à l’adresse de la femme agressée mais aussi à celle de l’homme agresseur.
C’est signé Rébecca Deraspe, avec en vedette Anna Beaupré Moulounda, Debbie Lynch White, Christian Michaud, Olivier Normand et Daniel Gadouas.
Collaboration spéciale de notre correspondant à Québec, Sylvain Tremblay
Photos de Vincent Champoux. Pour passez voir cela jusqu’au 4 février : https://bordee.qc.ca/
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